Joseph ZOBEL
Mis en ligne le 22 juin 2004.
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Joseph ZOBEL
Joseph Zobel, l'un des « piliers » de la littérature antillaise, est né
à Rivière-Salée, dans le Sud de la Martinique, en 1915.
Une enfance dont le récit a fait le tour du monde
Issu d'une famille très modeste, il est élevé par sa grand-mère Man
Tine, ouvrière agricole auquel il rend hommage dans son roman La Rue
cases-nègres. Pour poursuivre ses études, il rejoint sa mère à
Fort-de-France et franchit grâce à ses sacrifices toutes les étapes d'un
parcours scolaire brillant, jusqu'au baccalauréat.
Un premier emploi au service des Ponts et Chaussées lui permet de vivre
dans les villages du Saint-Esprit et du Diamant (la vie de la population
de ce village de pêcheurs de la côte caraïbe de la Martinique lui
inspirera deux romans, Diab'la et Les mains pleines d'oiseaux).
Joseph Zobel poursuit sa carrière comme aspirant répétiteur au Lycée
Schoelcher (pour devenir maître d'externat). La Seconde Guerre Mondiale,
isolant la Martinique de la France, le conduit à renoncer à ses projets
d'études d'architecture en France.
Naissance d'un écrivain
Ses aspirations artistiques débouchent sur l'écriture de quelques
nouvelles dans lesquelles il décrit la vie du monde rural martiniquais.
Un ami professeur de gymnastique porte ses textes au journal "Le
Sportif", feuille de chou habituellement consacrée à la publication des
comptes-rendus de rencontres sportives. Les lecteurs du Sportif
s'enthousiasment pour ces textes (publiés plus tard dans le recueil
Laghia de la mort) qui retranscrivent les réalités martiniquaises. Parmi
ses lecteurs, Aimé Césaire, engagé dans l'aventure de la revue
Tropiques, encourage Joseph Zobel à écrire un roman. Ce sera Diab'la,
l'histoire d'un paysan qui décide de conquérir sa liberté par le travail
de la terre, auprès d'une communauté de pêcheurs dont il partage la vie.
Le thème du roman, pas plus que l'auteur, qui fustige l'ordre colonial,
ne plaisent guère à la censure, qui « devrait délivrer des autorisations
d'impression pour la moindre étiquette de bouteille de liqueur », selon
Zobel. Le roman ne sera publié qu'en 1947.
Le ralliement de la Martinique à la France Libre, en 1943, marque la fin
du règne repressif de l'Amiral Robert, envoyé du gouvernement de Vichy.
Joseph Zobel rencontre alors le gouverneur Ponton, envoyé par le Général
de Gaulle et la France Libre. Homme de culture, (c'est chez lui que
Joseph Zobel rencontre Louis Jouvet, de retour de son exil aux
Etats-Unis), il recrute le jeune écrivain comme attaché de presse du
gouverneur, reponsable de deux publications : la revue Antilla et
l'hebdomadaire culturel La Semaine Martiniquaise. Après le suicide du
gouverneur Ponton, dont le remplaçant n'accorde pas d'intérêt aux
questions culturelles, Joseph Zobel retourne au Lycée Schoelcher comme
secrétaire du proviseur.
1946, le paquebot Colombie...
Le S.S. Colombie, en escale à Curaçao - 8.7 ko
Le S.S. Colombie, en escale à Curaçao
Par Jean-Paul BAQUIAST
Profitant d'un congé administratif, il rejoint Paris pour y reprendre
ses études en 1946. Suivant des cours de littérature, d'art dramatique
et d'ethnologie à la Sorbonne, Joseph Zobel est en même temps professeur
adjoint au Lycée François Ier de Fontainebleau, ville où il s'installe
avec son épouse et ses trois enfants en 1947. C'est à cette époque qu'il
découvre la France rurale et en particulier le Gard.
1950, le triomphe de La rue Cases-Nègres
Publié pour la première fois en 1950, son roman La Rue Cases-Nègres
reçoit le Prix des lecteurs, décerné par un jury de 1000 lecteurs de La
Gazette des Lecteurs. Le roman connaît un grand succès, renforcé trente
ans plus tard quand la réalisatrice Euzhan Palcy en tirera un film du
même nom (Ce film a obtenu le Lion d'Argent à la Mostra de Venise en
1982, et Joseph Zobel y tient le rôle du curé dans une brève scène).
1957, la découverte de l'Afrique
En 1957, porté par son désir de connaître l'Afrique, Joseph Zobel
profite de ses nombreuses relations parmi les Sénégalais de Paris (dont
Léopold Sédar Senghor) et part au Sénégal dans le cadre des dispositifs
mis en place par la loi-cadre. Le Ministre sénégalais de l'Education,
Amadou Matar M'bow, le recrute comme directeur du collège de Ziguinchor
(actuellement Lycée Djignabo) en Casamance. Il revient quelques mois
plus tard sur Dakar comme surveillant général du lycée Van Vollen et
devient quelques années plus tard producteur d'émissions éducatives et
culturelles à la Radio du Sénégal, dont il crée le service culturel. Les
émissions de Joseph Zobel seront écoutées dans toute l'Afrique
Occidentale Francophone. Quelques anecdotes de sa vie dakaroise sont
relatées dans les recueils Mas Badara (1983) et Et si la mer n'était pas
bleue (1982).
En Cévennes, à la recherche de la beauté
Installé en France depuis sa retraite en 1974 près du village d'Anduze
(département du Gard), Monsieur Zobel poursuit aujourd'hui, dans un
paysage qui n'est pas sans rappeler les mornes du Sud de la Martinique,
son travail d'écriture. Il pratique en maître l'art floral japonais et
le dessin.
En plus de La Rue Cases-Nègres, Zobel raconte la vie de la Martinique
rurale dans ses romans Diab'la, Les Jours immobiles (réécrit sous le
titre Les Mains pleines d'oiseaux en 1978 pour un public plus large)
ainsi que dans les recueils de nouvelles Laghia de la mort (recueil des
textes publiés dans "Le Sportif" et Et si la mer n'était pas bleue.
En mars 2002, Zobel publie Gertal et autres nouvelles, un recueil de
nouvelles suivies d'extraits de son journal (1946 à 2002).
Poète depuis de longues années, Joseph Zobel publie plusieurs recueils
de poésie à compte d'auteur, dont Poèmes de moi-même (1984). Publié en
1994, Poèmes d'Amour et de Silence réunit des extraits d'un journal, des
poèmes et des dessins qui en font un très beau livre d'art. En 2002,
l'auteur publie chez Ibis Rouge Le Soleil m'a dit..., un ouvrage
rassemblant une partie de son oeuvre poétique.
Par ailleurs, en avril 2000, le lycée Thoraille à Rivière-Salée (97215
Martinique) a été rebaptisé le Lycée Joseph Zobel, en l'honneur de
l'écrivain. Et le Salon du Livre Insulaire d'Ouessant a décerné son
Grand Prix à Joseph Zobel, pour l'ensemble de son oeuvre, en août 2002.
Cet article a d'abord été écrit en 1997 pour mon site CADENCES CREOLES,
puis réécrit en 2001 pour le site Internet d'Iles en Iles de Thomas C.
SPEAR, consacré aux littératures insulaires francophones.
© Bwabrilé, 22 juin 2004.
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